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  • Florian Candan /

    Stipulations du bail relatives aux gros travaux et à la clause de souffrance

    Cour de Cassation – 3e Chambre Civile

    25 mars 2014

     

    Résumé: 

     

    Les travaux d’installation d’une cloison contre les maçonneries enterrées afin de mettre fin aux infiltrations ne sont pas des gros travaux car ils ne touchent pas à la solidité de l’immeuble.

     

    La présence quotidienne de camions, la fermeture du magasin plusieurs mois alors même que l’activité de prestations de services ne nécessite pas l’ouverture de ce dernier et la présence d’échafaudages ne sont pas anormales au vue  de la nature des travaux à réaliser et ne permettent pas l’indemnisation du locataire.

     

    COMMENTAIRE: 

     

     

    Cet arrêt concerne la question des gros travaux et la clause de souffrance du locataire en cas de travaux réalisés pendant plus de 40 jours par le bailleur.

     

    L’article 1720 du Code civil énonce que :  

     

    « Le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparation de toute espèce.

     

    Il doit y faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autre que les locatives ».

     

    Cet article met donc à la charge du bailleur un certain nombre d’obligations.

     

    Parmi les plus importantes figure celle relative à son obligation de délivrance et du maintien de la chose en bon état pendant toute la durée du bail.

     

    Cependant, cet article n’est pas d’ordre public, les parties peuvent donc contractuellement y déroger.

     

    En l’occurrence, dans cette affaire, le bailleur n’avait à sa charge que les grosses réparations ainsi que le clos et le couvert.

     

    Il n’était donc tenu que des réparations relatives à la solidité et à la structure générale de l’immeuble.

     

    En l’occurrence, des infiltrations étaient présentes en cave.

     

    Ces dernières étaient dues à un défaut d’étanchéité des parements extérieurs des maçonneries enterrées, et à l’absence d’aération permanente.

     

    Un rapport d’expert préconisait les travaux nécessaires pour mettre fin aux désordres.

     

    Ils consistaient en la mise en place d’une cloison contre les maçonneries enterrées afin de mettre fin aux infiltrations.

     

    La Cour a considéré que ces travaux ne touchaient ni à la solidité de l’immeuble, ni ne constituaient de grosses réparations à la charge du bailleur.

     

    Concernant le deuxième point, le preneur soulevait le fait que ces travaux avaient duré plus de 40 jours.

     

    Or, le contrat de bail stipulait que le preneur souffrirait des grosses réparations nécessaires aux locaux pendant la durée du bail, sans pouvoir réclamer aucune indemnité ni de diminution du loyer quel que soit la durée des travaux.

     

    Cette clause dérogatoire au droit commun, et plus particulièrement à l’article 1724 du Code civil, est appliquée à la condition que la gêne occasionnée ne soit pas anormale.

     

    En l’occurrence, elle ne l’était pas puisque la Cour relève que le locataire ne rapporte pas la preuve d’une telle gêne.

     

    Elle relève que la présence quotidienne de camions, la fermeture du magasin plusieurs fois alors même que l’activité de prestations de services ne nécessitait pas l’ouverture de ce dernier et la présence d’échafaudages n’était pas anormale au vue  de la nature des travaux à réaliser.

     

    La Cour a donc débouté le locataire de cette demande.

     

     

  • Florian Candan /

    Modifications des facteurs locaux de commercialité et déplafonnement

     

    Cour d’Appel de PARIS – 27 mai 2014

     

    Résumé :

     

    Justifie le déplafonnement et la fixation du loyer à la valeur locative, en raison de la modification des facteurs locaux de commercialité, le local commercial dans lequel s’exerce l’activité de restauration casher dans un quartier dont le développement et les mutations sont avérés.

     

    L’augmentation du chiffre d’affaire du fonds de commerce étant également un argument au déplafonnement.

     

    COMMENTAIRE: 

     

     

    Dans cette affaire, le bailleur avait donné à bail, à compter du 1er mai 1998, des locaux situés à proximité de la rue des Rosiers à destination de Bar, Restaurant, Salon de thé et Piano bar, moyennant un loyer annuel en principal de 27.440 €.

     

    Par un congé avec offre de renouvellement en date du 27 décembre 2006, le bailleur a proposé le renouvèlement pour un loyer annuel en principal de 80.000 €.

     

    A la suite du refus du locataire sur ce prix, un Expert a été désigné et a conclu au déplafonnement du loyer en se fondant sur une valeur locative de 47.500 €.

     

    Pour faire droit à la demande  du bailleur, la Cour d’Appel de PARIS relève que le déplafonnement est justifié dans la mesure où le commerce, servant de la nourriture casher, est situé en plein cœur du quartier Juif du Marais, secteur analysé par l’Expert comme un quartier dont la commercialité est en pleine mutation en vertu de l’installation de commerces d’équipements en lieu et place des commerces alimentaires traditionnels et du fait d’une animation permanente de jour comme de nuit participant à « un circuit de chalandise ».

     

    En outre, la Cour relève que le rapport d’expertise indique une modification du secteur due à l’augmentation de la fréquentation de la station de Métro Saint-Paul, du Musée CARNAVALET, au réaménagement urbain, à l’arrivée d’enseignes célèbres de prêt-à-porter qui sont de nature à avoir modifié les facteurs locaux de commercialité.

     

    La modification de ces facteurs locaux de commercialité est également mise en relation avec l’augmentation constante des prix de cession des fonds de commerces.

     

    En outre, la Cour d’Appel compare la modification de ces facteurs locaux de commercialité avec l’évolution du chiffre d’affaires qui, sur la période en question, avait doublé.

     

    Le déplafonnement était donc justifié.

     

     

     

     

  • Florian Candan /

    POINT DE DEPART DU DELAI DE PRESCRIPTION DE DEUX ANS POUR REQUALIFIER UN BAIL SAISONNIER EN BAIL COMMERCIAL

     

    Cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE – 4 mars 2014

     

    Résumé : 

     

    La prescription de l’action  court à compter du jour où le droit acquis prend naissance c’est-à-dire à l’expiration du bail dont la nature est contestée.

     

     

    COMMENTAIRE

     

    Cet arrêt apporte une précision sur le point de départ de la prescription de deux ans concernant une action en requalification d’un bail saisonnier (mais la décision vaut également pour les baux de courte durée) en bail commercial.

     

    En l’espèce, le bailleur avait octroyé plusieurs conventions successives d’occupation saisonnière d’une durée de 7 mois chacune allant du 1er mars au 30 septembre.

     

    La première de ces conventions s’était terminée, en théorie, le 30 septembre 2003 pour ensuite être renouvelée du 1er mars 2004 au 30 septembre 2004 et ainsi de suite jusqu’au 30 septembre 2007.

     

    Le fonds de commerce avait pour objet l’exploitation d’une activité de prêt-à-porter dans une galerie marchande.

     

    Afin de démontrer que les dates d’exercice de l’activité prévues contractuellement n’étaient pas les dates réelles, et que l’activité s’exerçait toute l’année, le preneur pour justifier de sa présence dans les lieux, de façon continue, apportait de nombreux éléments en ce sens au débat.

     

    A l’appui de sa démonstration il indiquait l’absence d’état des lieux de sortie à l’issue de chaque période de location, produisait la preuve de la souscription des abonnements annuels d’assurance, d’électricité, de téléphone et d’assurance sur  les années 2003 à 2007, y compris hors les périodes contractuellement convenues.

     

    L’ensemble des constatations établissait donc une jouissance des lieux sans discontinuité.

     

    Ainsi, en se fondant sur l’article 145-60 du Code de commerce qui énonce en substance que toutes les actions relatives à l’application du statut des baux commerciaux se prescrivent par deux ans, le preneur soutenait que le point de départ de ce délai devait être la date d’échéance de la dernière convention venant à expiration le 30 septembre 2007.

     

    Néanmoins, la Cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE en a déduit des différents éléments précités que le preneur avait eu la jouissance des lieux sans discontinuité sur la période courant du 1er octobre 2003 au 29 février 2004 retenant cette dernière date comme point de départ et jugeant donc son action comme prescrite car initiée le 26 décembre 2007.

     

    Cet arrêt est conforme à la jurisprudence maintenant ancienne (Cour de Cassation – 3ème Chambre Civile – 6 février 1991) qui fait partir la prescription de l’action à compter du jour où le droit acquis prend naissance c’est-à-dire à l’expiration du bail dérogatoire.

     

    Avec les nouvelles dispositions de la loi PINEL, ce type de contentieux est donc logiquement voué à disparaitre.